Le changement de couleur
- Hugo Ravin
- 30 nov. 2016
- 6 min de lecture
Le changement de couleur
Le caméléon, comme nous l’avons vu précédemment, est le reptile capable de changer de couleur. Bien entendu, il n’a pas une peau comme les autres. En effet, celle-ci est constituée de plusieurs couches :

Sur ce schéma, on remarque que l’épiderme est constitué de trois couches différentes :
- La couche cornée : qui est principalement composée de cellules mortes.
- La couche de malpighie : celle-ci est constituée de cellules produisant de la kératine, appelées kératinocytes. Ces cellules donnent la dureté à cette peau
- La couche germinative : qui va permettre un renouvellement de l’épiderme, grâce à la division cellulaire. Sous l’épiderme, réside le derme, lui-même divisé en trois couches différentes : - En premier lieu, nous avons les lipophores, eux-mêmes divisés en deux parties : ils contiennent les xanthophores et les erythrophores. Les xanthophores, sont des pigments de couleur jaune contenant de la ptérine, et les erythrophores qui sont, quant à eux, des pigments de couleur rouge contenant du caroténoïde.
- Ensuite viennent se loger les iridophores, ceux-ci ne sont pas des pigments mais bien des cellules iridescentes constituées de cytoplasme dans lequel se trouve de la guanine (une des bases azotées de l’ADN). - Et enfin, nous avons la mélanophore, cellule contenant la mélanine, pigment de couleur marron/noir qui se remplit et se déplace plus ou moins dans la cellule. Quel est le rôle de la mélanine ? La mélanine, comme nous vous l’avons dit, peut se déplacer dans la mélanophore à travers les filaments, suite à un message nerveux ou hormonal. Ce déplacement va permettre au caméléon de devenir plus ou moins clair en fonction de son humeur. Lorsque le caméléon est dérangé ou perturbé, la mélanine se déplace vers le haut de la mélanophore afin d’avoir une couleur vert foncé/marron:

Mais lorsque le caméléon est au repos, la mélanine n’a pas besoin de se déplacer et reste alors proche du noyau : sa couleur originelle, le vert vif, réapparait alors :

Mais, la mélanine n’est pas le seul facteur de modification de couleur du caméléon. En effet, le derme de ce reptile est constitué de cellules qui répondent à la lumière blanche.
Mais qu’est ce que la lumière blanche ? La lumière blanche est une lumière constituée de toutes les couleurs de l’arc en ciel. Et oui, la lumière qui sort de votre lampe située sur votre table de nuit contient toutes ces couleurs splendides. Vous ne me croyez pas ? Et bien, nous avons fait une toute petite expérience, que l’on trouve dans les manuels de physique, pour vous le prouver :

Tout d’abord, nous avons besoin d’une lampe, d’un prisme (instrument optique qui consiste à réfracter ou décomposer la lumière blanche) et d’un écran.

Grâce à cette petite expérience, nous pouvons affirmer que la lumière blanche est constituée de toutes les couleurs de l’arc en ciel. Mais comment la lumière peut se diviser grâce au prisme ? Tout d’abord nous apprenons que la lumière visible est constituée de longueurs d’onde comprises entre 380 nanomètre (nm) et 700 nm, chaque longueur d’onde a un indice de réfraction différent des autres. Dans cette expérience, lorsque la lumière blanche entre en contact avec le prisme, le milieu est différent (de l’air, on passe au verre) : des rayons de couleur se divisent alors, car leurs indices de réfraction ne sont pas les mêmes, c’est pour cela que l’on voit toutes ces couleurs.

Résultat de notre expérience de décomposition de la lumière
Pourquoi nous vous parlons de ça ? Tout simplement pour pouvoir mieux vous expliquer le fonctionnement des lipophores et des iridophores. Les lipophores, comme nous vous l’avons dit, sont deux catégories de pigments, l’un est jaune (xanthophore) l’autre est rouge (erythrophore). Ces pigments font partie de la famille des biochromes, c'est-à-dire qu’ils absorbent une partie du spectre de la lumière visible, permettant ainsi de renvoyer les autres rayons à l’œil du curieux qui regarde ce petit reptile. Nous savons qu’un objet nous parait blanc car il renvoie en même temps toutes les couleurs du spectre lumineux, tout comme un objet nous parait noir car celui-ci absorbe toutes les couleurs du spectre. Et un objet nous parait d’une couleur car celui-ci absorbe une partie du spectre et en renvoie une autre. C’est ce qui ce passe chez les lipophores : La ptérine qui se trouve dans le xanthophore va absorber une partie du spectre entre 380nm et 550nm, ce qui correspond au bleu et au violet. Il renvoie alors le rouge et le vert qui forment le jaune. La caroténoïde se trouvant dans l’erythrophore va, quant à lui, absorber les longueurs d’onde comprises entre 400 et 500 nm, ce qui correspond au bleu, et la synthèse du jaune, du vert et du violet donne du rouge. Quant aux iridophores (nanocristaux), ceux-ci font partie des cellules schemochromes, qui émettent une coloration en plusieurs longueurs d’onde, on parle plus souvent d’iridescence.
Qu’est ce que l’iridescence ? C’est un phénomène optique qui provient de la structure de l’objet que l’on regarde. En fonction de l’angle de vue on perçoit une couleur différente. On observe ce phénomène sur des CD-ROM,

Des bulles de savon,

Ou encore sur les ailes des papillons

Papillon Morpho, qui vit en Amérique centrale
On peut se demander d’où viennent ces belles couleurs de l’arc en ciel, et bien, c’est ce qu’on appelle l’iridescence. Ces couleurs s’expliquent suite à un empilement de microstructures, qui divisent justement la lumière blanche grâce à un changement de milieu, comme nous l’avons expliqué un peu plus haut. En fonction de notre angle de vue, la couleur change. Nous avons fait une petite expérience pour mieux vous l’expliquer : Nous avons besoin : d’une paille et d’une solution aqueuse mélangée à du liquide vaisselle (pour pouvoir faire la bulle) et d’une lampe à lumière blanche.
EXPERIENCE A PARTIR D’UNE BULLE DE SAVON :
On mélange de l'eau et du savon puis on souffle avec une paille dans notre mélange
Nos résultats:

De belles couleurs apparaissent sur la bulles: on observe ici le phénomène d'iridescence.
Schéma simplifié d’une bulle:

Lorsqu’une bulle est éclairée par la lumière blanche nous observons de l’iridescence. Ce phénomène est visible grâce au mince film d’eau savonneuse qui emprisonne l’air. Ici l’iridescence est provoquée par un changement de milieu air/eau savonneuse (dioptre).Le rayon incident (lumière blanche), à la rencontre du film de savon, se divise en plusieurs rayons : l’un est alors immédiatement réfléchi lors de son premier contact avec la première couche tensioactive (rayon réfléchi) et les autres sont transmis jusqu’à la deuxième couche tensioactive et sont ainsi à leur tour, réfléchis (rayons interférents) sur l’interface eau savonneuse/air. A la sortie de la bulle les rayons sont parallèles.

Et le caméléon dans tout ça ?
Maintenant, nous savons que le caméléon est capable de changer de couleurs grâce à la mélanine qui se déplace dans les mélanophores, mais cela ne nous explique pas d’où vient la couleur verte de ce reptile.
L’explication de la coloration du caméléon a progressé, notamment au début 2015, avec la publication des travaux du généticien Michel Milinkovitch. Les scientifiques ont longtemps pensé que le caméléon changeait de couleur quand les pigments des cellules de sa peau se répandaient le long d’extensions cellulaires semblables à des veines. Cette théorie ne convient pas, estime le chercheur: de nombreux de caméléons sont verts sans posséder de pigments verts dans les cellules de leur peau. Milinkovitch et ses collègues de l’université de Genève ont alors «fait travailler ensemble la physique et la biologie». Sous une couche de cellules pigmentaires, ils ont trouvé une autre couche de cellules: elle renfermait des nanocristaux (iridophores) organisés en un maillage triangulaire. Soumis à des produits chimique, des échantillons de peau de caméléon ont révélé que ces cristaux peuvent être «réglés» pour modifier l’espace entre eux. Ce qui affecte la couleur de la lumière réfléchie par le maillage. Plus la distance entre les cristaux augmente, plus les couleurs réfléchies passent du bleu au vert, puis au jaune, à l’orange et au rouge. Un étalage ordinaire chez certains caméléons panthères lorsqu’ils passent du calme à la nervosité ou à un état amoureux. Ce vert est due à la synthèse des couleurs des autres pigments colorés qui constituent le derme. Expliquons-nous: nous savons qu’il y a des pigments qui renvoient la couleur jaune (xanthophores) et le rouge (erythrophore), puis il y a les iridophores qui renvoient du bleu. La synthèse de ces trois couleurs forme le vert. Donc lorsque le caméléon est au repos, la mélanine ne se propage pas et la synthèse des trois cellules colorées peut s’opérer. Lorsqu’il est en présence d’une femelle ou d’un rival, la mélanine se propage et recouvre les côtés de la cellule, bloquant ainsi les rayons de couleurs des iridophores, seulement la synthèse du jaune et du rouge va pouvoir se faire ce qui donne cette couleur orangée et lorsqu’il est en présence d’un prédateur, la mélanine se propage dans toute la mélanophore et tous les rayons des cellules situées dans le derme vont être bloqués ce qui explique cette couleur sombre: le marron foncé.
Nous avons vu que le caméléon change de couleur grâce à sa peau très complexe constituée de pigments colorés et iridescents. Ensuite, nous allons voir si ce mécanisme de changement de couleur est adaptable pour d’autres technologies.
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